Vivre avec la Sclérose en Plaques.
Vlahis nous confie donc sa vie, son histoire et son ressenti vis à vis de sa maladie et de son handicap.
N’hésitez pas à réagir et à partager vos pensées vis à vis de ce témoigne poignant.
Retrouvez son blog : http://doucebarbare.com
Vlahis, 32 ans ne se résume pas à sa SEP
La poule voulait écrire un article sur moi, sur la SEP (comprenez la sclérose en plaques), le handicap. Pas super précis comme point de départ! Mais allez je me lance…
Oui j’ai une SEP, je suis handicapée et je suis aussi une fille au sale caractère qui se voulait rebelle, sauvage, différente et qui est juste une femme parmi d’autres, atteinte de sclérose en plaques et circulant sur son fauteuil roulant!
La SEP (et non ce n’est pas un champignon même si en bonne ardéchoise que je suis les champignons, c’est bon!) est un acronyme pour nommer la sclérose en plaques.
La Sclérose en plaques, qu’est ce que c’est?
C’est une maladie neurologique, invalidante et évolutive. Cette définition ne vous avance pas vraiment reconnaissez le! En gros mon système immunitaire attaque la gaine de myéline entourant les axones qui eux permettent à l’information (bouge ta jambe, tu as mal au bras…) de passer entre les neurones.
La sclérose en plaques peut toucher différentes parties du cerveau où de la moelle épinière ce qui explique que les symptômes peuvent être très variés. Les endroits où la myéline est grignotée sont appelés des plaques et apparaissent comme telles sur les IRM (des tâches blanches).
Je fais partie d’une famille de 80000 personnes uniquement en France où les femmes jeunes sont plus nombreuses! C’est également la deuxième cause de handicap chez les jeunes après les accidents de la route.
Il existe trois grandes sortes de SEP.
La mienne est appelée récurrente-rémittente; elle évolue sous forme de « poussées » qui se caractérisent par l’apparition de nouveaux symptômes, ou l’aggravation de ceux déjà présents. Les signes cliniques doivent être présents au moins 24 h. Les médecins appellent cela un épisode inflammatoire que l’on traite par perfusions de cortisone à haute dose.
Les symptômes disparaissent en fonction des personnes en quelques jours ou quelques mois.
En plus des ces formes différentes, cette maladie évolue très différemment d’une personne à l’autre: certains n’utiliseront jamais de fauteuils roulants, certains ne feront pas de poussées pendant 15 ans, certains auront de graves problèmes de visions…
Et cette évolution négative ou positive est imprévisible. Oh joie!
En ce qui me concerne, j’ai gardé des séquelles de quasiment toutes mes poussées et ma maladie n’a cessé de progresser depuis le diagnostic (il y a 7 ans, j’avais 25 ans) même si j’ai eu des périodes plus calmes que d’autres.
Il existe une échelle officielle permettant de quotifier les différents handicaps, je ne sais pas où je suis située par contre je sais que: j’ai des difficultés d’équilibre, des difficultés motrices (perte de force, et spasticité), des problèmes urinaires (qui se sont associés à des moments à des problèmes sexuels), une cornée abimée et des nystagmus à l’oeil droit (l’oeil qui bouge tout seul), des douleurs. Après quand je suis particulièrement fatiguée, j’ai des problèmes d’élocution.
Un des symptômes les plus courants et le plus partagé par toutes les personnes atteintes, est la fatigue.
Ce n’est pas celle de fin de semaine ou de lendemain de week-end de fou, non c’est une fatigue de masse: elle est écrasante, quotidienne, assez inexplicable, incompréhensive pour les autres et particulièrement difficile à décrire.
Pour ne pas endormir vos propres neurones, je ne m’attarderais pas plus sur les aspects purement techniques. Il existe de nombreux sites qui expliquent de manière simple ou détaillée le fonctionnement de la sclérose en plaques, en voici un dont je suis sûre de la pertinence du contenu (on est sur internet quand même, faut se méfier!)
Une fois cette petite mise au point de faite, il reste le plus intéressant!
Comment je vis avec la Sclérose en plaques ?
Peut être certains se diront « oui mais il y en a des moins graves que d’autres, des mortelles et d’autres qui ne le sont pas ».
Pour moi toutes les maladies se valent et poussent la personne à changer, à s’adapter, à évoluer.
Ma SEP n’est pas mortelle par contre celle que j’étais a disparue.
Puis je parle de maladie, mais qu’en est il d’un deuil, d’un accident, d’une perte d’emploi… Ce sont tous ces éléments de la vie qui font dire qu’elle n’est pas toute rose et qui nous poussent à nous adapter. C’est en ça que l’homme est fort, il s’adapte et il l’a toujours fait.
Je crois au plus profond de moi que chacun a les ressources nécessaires pour rebondir quand il se trouve devant un mur infranchissable.
Pour moi ce n’est pas du courage, c’est simplement dans l’ordre des choses.
Le regard des autres avec des phrases chocs
Bon allé ça suffit d’être sérieux! Je vous ai concocté une petite liste des phrases auxquelles je suis confrontée quotidiennement ! Sortez votre dose d’humour, c’est parti !
- « La cousine de ma tante , elle a une sclérose en plaques, mais elle est tellement courageuse. De toute manière cette maladie si vous êtes fort dans votre tête vous êtes bien moins malade »
HaHaHa! Bien sûr que le moral joue un rôle dans toutes maladies mais attention à ne pas tout confondre. La SEP n’est pas une maladie qui se contrôle par la seule force de l’esprit.
- « Avec la volonté on peut tout faire »
Comme la plupart des enfants j’en ai bouffé du « si tu veux tu peux ».
Maintenant je dis STOP. Bien sûr que quand on veut quelque chose il faut se donner les moyens de l’atteindre.
Par contre, aujourd’hui quand je regarde une série américaine ( mon dada!) où la jolie docteur fait un footing et souffre de ses ampoules aux pieds, j’ai beau me dire que ça me donne carrément envie, et bien non je n’irai pas faire un footing! Par contre, oui je peux aller me balader si on adapte la promenade au fauteuil.
- « Vous profitez de votre handicap. »
Croyez moi, cette phrase arrive beaucoup plus souvent que l’on ne le pense ! Que ce soit parce que l’on demande une attention particulière dans un magasin d’habits mal adapté, que l’on passe devant tout le monde à Beaubourg (hein la poule !) ou dans un supermarché, il y a une raison derrière tout cela.
C’est vrai que le handicap donne certains privilèges, le nier serait malhonnête.
Mais la plupart du temps ils sont là pour compenser un désavantage: une impossibilité à rester debout longtemps, une organisation qui se doit d’être parfaite pour aller d’un point A à un point B parce que les transports en commun ne sont pas toujours accessibles, les bateaux des trottoirs pas toujours respectés par les voitures qui se garent dessus…
C’est pour continuer à VIVRE que ces avantages existent, il faut bien l’avoir en tête.
- « Oh ma pauvre, vous êtes si jolie ou si jeune »
C’est vrai que si j’étais moche ou vielle ce serait moins grave…
- « Il faut que tu te battes. »
Ah ben oui c’est vrai j’ai vachement le choix… merci du conseil…
Il y a un regard qui selon les jours me fait rire, et des fois m’agace profondément: le regard inquisiteur.
La personne qui va me regarder pendant un long moment de haut en bas en se retournant pour continuer à me scruter!
Il se trouve que comme beaucoup de personnes en fauteuil roulant je ne suis pas paraplégique donc je peux parfois me lever voir faire quelques pas…et ça il faut bien le dire : CA CHOQUE!
Mais le pire regard et que je ne peux éviter c’est le mien.
Justement et mon propre regard?
Je n’ai pas honte d’être une personne handicapée mais oui souvent je me sens faible, diminuée.
Je commence à supporter de me voir dans une vitre même quand je suis en fauteuil mais j’ai encore du mal.
Mon image a changée et c’est comme toujours une question d’adaptation.
Sur l’article parlant des problèmes de poids, La poule en parlait.
C’est certes différent mais je crois que dans le fond les choses se ressemblent.
Aujourd’hui on pourra me dire que je suis jolie je ne trouverais pas grâce à mes yeux : je suis exigeante, intransigeante même.
Je ne suis pas ce que j’aurais voulu être. Dans la rue ce que l’on remarque en premier c’est la jeune femme en fauteuil roulant pas la jolie jeune femme, où en tout cas c’est ce que moi je remarque quand je me vois.
Je me refuse à mettre des chiffres dans la douleur, dans la gravité, dans le handicap comme s’il y a avait une échelle du plus grave au moins grave.
« Le terme handicap désigne la limitation des possibilités d’interaction d’un individu avec son environnement, causée par une déficience provoquant une incapacité, permanente ou non, menant à un stress et à des difficultés morales, intellectuelles, sociales et/ou physiques » (Wikipédia.)
On est tous handicapé dans un domaine, on a tous des limitations à un moment de notre vie.
Mais on a aussi des capacités qui vont de pair:
A pieds, je ne fais pas plus de 200 mètres dans les bons jours mais avec mon fauteuil (et en descente!) je vous mets à tous la pâtée!
Mais rien à faire ce que je vois en premier chez moi, c’est ce que je ne suis pas ou plus.
J’ai passé un diplôme d’éducatrice pour jeunes enfants, j’ai adoré mon métier puis j’ai du l’arrêter.
J’ai voulu être maman avec une grande famille. J’ai 32 ans et pas d’enfants.
J’étais passionnée de théâtre, aujourd’hui je n’arrive plus à me mettre en scène, le fauteuil étant de trop!
Je rêvais d’une grande maison à la campagne avec des animaux et surtout perdu sur le plateau ardéchois ou n’importe-où où le premier voisin aurait été à des kilomètres. J’habite dans une petite ville, dans un appartement neuf pour qu’il soit accessible au fauteuil.
Ma vie n’est pas triste, je suis en formation de médiation familiale, je vis en couple, je fais de l’escrime depuis mon fauteuil roulant, j’aime ma petite ville et mon grand balcon mais je ne suis pas celle que je voulais être.
On est tous obligés d’adapter ses volontés d’enfants à la réalité.
Mais quand tout ce qui faisait socle de valeurs pour vous, tout ce qui donnait un sens à votre vie doit être modifié, c’est très dur et ça demande beaucoup de temps.
Est ce qu’un jour on accepte complètement ce nouveau soi? Je ne sais pas.
Pour certaines personnes, le fauteuil leur a permis d’avoir une vie qu’ils n’auraient pas eu autrement, ce qui est le cas du champion du monde de sabre par exemple.
Mais c’est dur de voir et d’accepter le fait que le handicap ou la maladie ne vous ait pas apporté que du négatif. C’est un peu lui faire une place dans votre lit, à contre cœur.
Moi, aujourd’hui ce qui rythme ma vie c’est la maladie, les moments où j’ai la frite où je fais le plus de sport possible pour progresser en escrime, alternant avec les moments où je suis en mode légume sur le canapé avec les moments ou je peux à peine aller prendre une douche sans m’étaler par terre, où je perds tous mes jolis abdos et ou je ne peux pas aller au mariage de mon amie d’enfance.
C’est mon quotidien et ce qui symbolise le plus cet aspect routinier c’est ce coup de fil que je viens de recevoir:
« - Ah, tu es en poussée ? Et tu vas comment?
- Pas top, j’ai des vertiges, je suis très fatiguée.
- Ah bon j’espère que ça va aller. Bisous. »
Il n’y a plus rien de surprenant ni même de vraiment inquiétant, c’est juste ma vie.
Pour moi ce n’est pas du courage, c’est simplement dans l’ordre des choses et c’est au delà de la simple volonté.
Je souhaiterais terminer en partageant une musique qui m’émeut, 6ème sens de Grand Corps Malade…
Tu as été touché par ce témoignage ? Partage-le !
Retrouvez son blog : http://doucebarbare.com
Très touchant cet article, surtout quand on voit de qui on parle ! « En vrai » pour te connaître un tout petit peu tu ne parais rien de ce que tu décris, « la fille en fauteuil roulant », qui n’est pas belle ou qui des fois n’a pas le moral, car tu es tellement guillerette et joyeuse qu’on en oublie tout le reste !
Bravo et merci de nous faire connaître et comprendre cette maladie !
Laurence
J’ai lu avec beaucoup d’intérêt tt ce que tu as écrit… je ne te connais que « virtuellemen » mais j’ai tj ressenti le courage que tu as devant ta situation. Pas simple de s’accepter autrement que ce que l’on était avant.. Difficile aussi de supporter parfois une souffrance quasi quotidienne, et aussi le regard des autres… Tu as en toi des possibilités et tu les mets en valeur pour t’adapter à ta vie, je te souhaite des tas de petites joies afin que la vie te paraisse plus simple, et puisque c’est demain le 1° Mai je t’envoie un gros bouquet de muguet pour que tu continues à sourire à la vie. Bisous de Gi
Bel article ! Ta maladie cette inconnu, on l’a fait notre puisque c’est la tienne… Mais à lire cet article, j’ai l’impression de si mal la connaître et on peut s’en vouloir de parfois l’oublier, mais pour moi tu es toujours la même…
je relève : « J’étais passionnée de théâtre, aujourd’hui je n’arrive plus à me mettre en scène, le fauteuil étant de trop! »
non ce n’est pas le fauteuil qui est de trop ! C’est la place que nous laissons à la différence qui n’est pas suffisante.
et si on écrivait une pièce de théâtre avec comme sujet : « on porte chacun son handicap » !
on met en scène les fauteuils, les aveugles, les sourds les muets ( pas facile mais bon !)
on pleure pas sur le sort des uns et des autre, mais avec humour on laisse deviner ce qu’est la vie de chaque jour !
Bonjour,
J’ai trouvé le témoignage et l’article de présentation excellents. Je suis atteinte de SEP moi aussi.
Pourrais-je reproduire votre article sur le journal local Eawy News, en vous citant comme source bien entendu.
J’attends votre accord avec impatience
Bénédicte
Bonjour Bénédicte, je vois avec la personne ayant bien voulu témoigner, et je vous recontacte par mail rapidement.
Merci en tout cas de l’intérêt que vous portez à ce témoignage !
c’est ma vie j’ai la sep ça fait 7 ans j’ai tout perdu ma femme mon travail heuresement j’ai trois filles qui me soutienne.
Merci pour ce témoignage,
une aide pour tous,
pour comprendre surtout
Tu es une femme courageuse et méritante
Merci et bon courage pour la suite
Isabelle de la Cordée
Bonjour,
Diagnostiquée depuis quelques mois seulement, j’ai des moments, comme ce matin, où je m’amuse à trouver quelques pages fiables (c’est dur dur dur le net) avec lesquelles je pourrais m’instruire sur cette maladie qui est encore très floue pour moi. Donc ce matin, partant d’un site que mon neuro m’a conseillée, j’en suis arrivée ici.
J’ai adoré te lire et quel étonnement de lire que tu es EJE , car ou même si la maladie a du faire que tu as arrêté ce beau métier, on reste je pense toujours EJE dans l’âme. Je le suis également, depuis 2011, en poste depuis 2012 où je m’épanouie complémente ment, voilà que la maladie m’est tombée dessus en avril 2014. Et que de questions que je me pose…. Sur tout.
Je ne sais pas si c’est par l’intermédiaire de ce commentaire que je pourrais te contacter mais j’aimerai réellement le faire donc je le poste quand même. Je vais tenter également via ton. Blog que j’ai aussi parcouru mais brièvement car l’infirmière va pas tarder à venir me pose ma dernière perf de corticoides.
En espérant pouvoir échanger un peu avec toi. Bonne journée. Marion
Bonjour Marion.
La poule m’a parlé de ton comm alors je viens te dire un mot ici.
Je connais quelques pages fiables et d’autres juste agréables à lire mais fiables aussi. Elles sont dans la rubrique mes chouchous sur mon blog.
Je suis contente que le témoignage t’es plu et je répondrais à toutes les questions que tu as envie de me poser.
A bientôt.
Doucebarbare (anciennement vlahisse)
Merci pour ce témoignage Vlahisse, et pour avoir mis des mots toutes ces situations que l’on vit au quotidien – pas en tant que patient, pour moi, mais en tant que mari d’une patiente – des grands classiques (« Mais tu n’as pas l’air malade si malade que ça ») aux heures de travail pour expliquer aux gens que la SEP n’est pas une « fin de vie immédiate » mais plutôt un coup de frein, que l’espoir existe de récupérer entièrement d’une poussée (tout en sachant que la prochaine peut arriver à tout moment).
Depuis sa dernière poussée il y a trois ans, mon épouse a passé son temps à tout réapprendre : réapprendre à marcher : 5 mètres, puis 10, puis 20, puis 50… Réapprendre à faire tout le reste, se laver, s’habiller, cuisiner… Et apprendre à s’accepter comme elle est, en fauteuil parfois et aujourd’hui avec une canne. C’est peut-être ce qui a été le plus dur pour elle, être trentenaire et avoir besoin d’aides à la mobilité. Aujourd’hui elle travaille à nouveau, conduit parfois (même si ca ne me plait pas trop, je dois laisser faire) et est capable d’aller jusqu’au magasin au coin de la rue pour acheter une brique de lait et une baguette, et c’est toutes ces petites choses qui lui permettent de tenir le coup, et de se sentir presque favorisée dans son handicap.
Depuis trois ans, on a appris à travailler en équipe, d’une façon que l’on n’aurait peut-être jamais pense possible, on prend chaque progrès comme une petite victoire, chaque gros progrès comme un monument a notre marche en avant, et à défaut de pouvoir changer le cours des choses, elle a pris et on a pris le parti de faire comme si rien n’était impossible.
Ça nous a pris du temps à accepter, à méditer, et puis finalement on a franchi le pas. Rien n’a le droit d’être impossible, même le plus grand des bonheurs. Dans quatre mois, notre premier enfant arrive et une nouvelle aventure commence. On ne sait pas comment on va faire, comment on va gérer la situation entre enfant et handicap, travail et éducation , mais ça va le faire, il faudra bien, et cette petite merveille pourra compter sur tout l’amour du monde même si les jambes ne suivent pas.
Votre témoignage m’a touché vraiment, merci d’avoir partager votre vie avec nous.
J’aimerai te dire tout simplement merci. Je me suis tellement reconnue dans ton texte. « Je ne suis pas ce que j’aurais voulu être », je cherche depuis longtemps pourquoi une tristesse incompréhensible s’empare de moi, tu as trouvé les mots, et ils ont provoqué un électrochoc. Je ne suis pas celle que j’aurai voulu être.
Mais comment faire pour me réconcilier avec moi même? Avec ce corps qui ne m’appartient plus vraiment? Que finalement, je bichonne tout en le détestant?
Merci encore.